UN ULTRALÉGER SUR FLOTTEURS,

POURQUOI PAS?

« Pourquoi je veux apprendre à piloter un ultra léger ?? Ben, c' t'affaire !!! Je veux aller à la chasse dans le Nord, ramener mon quota de caribou dans mon avion sur flotteur amphibie. Je suis allé à la chasse l'automne passé avec un pourvoyeur, mais ça coûte la peau des fesses. Je vais acheter mon petit avion et emmener mes chums pour payer le gaz. Je pourrais même me construire un chalet en haut du 60e parallèle; je pourrais alors me servir de l'avion pour monter les matériaux de construction.» Et la réponse polie à ce débordement d'enthousiasme ressemble généralement à ceci: « Si tu as une couple d'heures, viens t'asseoir; on va jaser. » Pour la réponse moins polie, bien que très terre à terre; je laisse libre cours à votre imagination, ou à votre mémoire.

Combien de fois ai-je entendu ce discours enflammé? Le néophyte est à la fois motivé par la passion, l'amour des grands espaces sauvages, l'ignorance la plus totale de toute notion d'aérodynamisme et d'un budget limité. Bien qu'il soit vrai qu'on peut installer des flotteurs sur un ultraléger, même des flotteurs amphibies si le c?ur vous en dit, ce procédé a toutefois les limites que le pilote hilare et émérite en vous connaît bien. Pour les plus hilares d'entre vous; rappelez-vous vos premières ambitions? Je vois d'ici votre rictus facial s'apaiser doucement ou s'amplifier allègrement. Bien sûr, le contact brutal avec la réalité gravitationnelle et aussi la dépense occasionnée par l'achat du « Otter » nécessaire aux rêves cités plus haut auront raison des ambitions aériennes de plusieurs de ces pilotes en herbes. D'autres, par contre, et je les salue ici bien bas, réviseront à la baisse le poids de leurs ambitions et hésiteront à réécrire les lois de la physique telles que nous les connaissons. Le budget contribue généralement lui aussi à restreindre la dimension de l'aéronef. Ces aspirants pilotes, s'ils sont bien conseillés, auront une longue et sécuritaire carrière de pilote d'ultra léger sur flotteurs.

Comme le témoignent les photos, les installations varient selon les besoins. Un monoplace léger, avec une autonomie de vol de deux heures et une vitesse de croisière de 40 ou 45 milles à l'heure, verra sa vitesse de croisière réduite à cause de la résistance supplémentaire produite par les flotteurs. Mais ce n'est pas cinq milles à l'heure de moins qui fera une grosse différence sur le temps estimé d'arrivée quand on ne va pas nulle part. Pour ces pilotes, le temps en vol est plus important que la distance parcourue. Ils veulent faire du temps de vol; pas nécessairement de la distance. Si vous êtes pressé, prenez le train, ça vous fera les dents. Ces machines ne sont évidemment pas conçues pour parcourir de grandes distances à chaque vol. Vous avez un chalet sur le bord d'un petit lac ou d'une rivière; vous avez votre ultraléger sur flottes attaché au quai. Le c?ur vous dit d'aller pêcher sur un petit lac à une demi heure de vol, en fin de journée, lorsque le vent est tombé. Vous voulez simplement aller faire des trous dans le ciel. C'est la machine idéale.

Comme vous le savez, il existe toute une gamme d'ultralégers avec tout autant de performances différentes. Soit les machines légères, équipées de petits moteurs qui bourdonnent à une vitesse de croisière modeste, jusqu'aux machines plus rapides qui s'élancent à travers les cieux avec un « groupe motopropulseur » puissant pour dévorer les milles à la vitesse de l'éclair.

Les ultralégers ont évolué, ils sont plus rapides, plus puissants; leur poids maximum permis au décollage a été augmenté. Ceci permet donc de penser à une charge utile plus importante, des vols de plus longue durée, donc en région plus éloignée. Car n'oublions pas, comme le disait si bien mon ami et instructeur Yvan, le but de la man?uvre: aller à la pêche ou à la chasse en territoire vierge ou à peine dépucelé. Ces endroits de rêve, ou la main de l'homme n'a pas encore déposé le flotteur, là ou les orignaux sont si gros que leur panache se mesure en hectare, là ou les poissons sont tellement énormes que le niveau du lac baisse à chaque fois qu'on en sort un. Ces territoires légendaires ne sont plus uniquement accessibles aux machines de plus gros gabarit.

Les flotteurs augmenteront le poids à vide et ralentiront probablement d'une dizaine de milles à l'heure la vitesse de croisière habituelle; ce qui demeure quand même, dans plusieurs cas, une vitesse très respectable, comparable à plusieurs avions conventionnels. Pensez au vénérable Piper Cub qui vole à 70 milles à l'heure sur roues; mettez-y des flotteurs ? La nouvelle génération de moteur à quatre temps, moins énergivore, offre un meilleur rayon d'action. Ces moteurs sont plus fiables que leur équivalent à deux temps, ou plutôt, devrais-je dire, moins problématiques. Ceci incite de plus en plus les pilotes à s'éloigner en ces régions si facilement accessibles en vol mais si difficiles, voire impossibles à atteindre par la route.

Les ultra légers modernes sont donc parfaitement comparables à certains avions certifiés ou de construction amateur. Plus rapides que les appareils de première génération, ces appareils plus modernes ont une charge utile fort acceptable, des performances souvent supérieures aux avions conventionnels de même gabarit quant à la distance de décollage et d'atterrissage, ils ont souvent aussi de meilleurs taux de montée, ils sont donc devenus très polyvalents.

La réglementation actuelle n'oblige pas le pilote d'ultra léger à suivre une formation sur flotteurs uniquement s'il désire emmener des passagers. Croyez vous vraiment que votre sécurité est moins importante que celle de votre passager? Si vous n'avez pas d'expérience sur les flottes, je ne peux m'empêcher de vous recommander fortement de prendre de la formation avec un instructeur expérimenté, peu importe votre expérience sur roues. Comme tous les pilotes de flotteurs vous diront, l'aviation sur flotteurs est un tout autre monde, chaque vol est une expédition.